Apres des années de conflit, la Syrie fait tomber son bourreau.
De Damas à Alep un reportage au coeur d'un pays meurtri.
8 décembre 2024 le groupe rebelle (HTC) Hayat Tahir Al Cham s'empare de la capitale, Damas. mettant fin à des décennies de régime sous la famille Al- Assad.
Une libération populaire en sursis et une révolution minutieusement réussie après tant d'années de souffrance et de chaos qui ne laissent personne indifférent, les émotions se mélangent entre bonheur et peur d'un avenir incertain. "Comment réapprendre a faire confiance ? " "Vont ils nous enliser dans un nouvel Afghanistan où nous, Femmes, serons privées de toutes libertés ? " " Le monde nous aidera-t-il ou continuera-t-il à fermer les yeux ?....
Tant de questions en suspend dans ce pays où la destruction est partout sous nos yeux.

" J'ai grandi dans cette classe et je suis devenu adulte dans la guerre. Aujourd'hui nous sommes libres mais ils nous faut tout reconstruire."
ADAM soldat de la révolution

Comme un retour de bâton, à la suite de l'exile en Russie de la famille Al-Assad, des centaines de syriens qui n'avaient pas revu leurs familles depuis plus de dix ans, ont pris d'assaut les avions direction Beyrouth pour revenir sur leur terre d'enfance.

" Treize ans après notre rencontre sur le chemin de l'Europe c'est ensemble que nous retournons chez nous et cela sonne comme un rêve impossible à concevoir. "
Mohamed et Amjad
A la frontière tout se mélange. Par peur de représailles, des familles Alaouites s'entassent, fuyant les nouveaux maitres de Damas. Elles, qu'hier encore, soutenaient et participaient à ce régime brutal et sanguinaire, ces exilés revenant des souvenirs pleins la tète, les bras chargés de cadeaux pour leurs proches qu'ils n'ont pas revus depuis tant d'années.
Des trafics en tout genre pour soutenir un pays où l'on manque de tout, où neuf syriens sur dix vivent dans la pauvreté depuis le début de la guerre en 2011 (33 % avant le conflit contre 90 % aujourd’hui). Quant au taux d’extrême pauvreté, il a été multiplié par six selon le PNUD passant de 11 % à 66 %.
Évaluation préliminaire des nations Unis est claire :
" les quatorze années de conflit ont réduit à néant près de quatre décennies de progrès économique, social et humain en Syrie. "
Apres près de 4 jours dans des avions low coast, un passage à la frontière désarment et un bout de route avec des trafiquants d'essence, Amjad retrouve le sourire en embrassant un membre de sa famille venu du nord pour de récupérer .

Depuis plus d’une décennie, ces deux étendards s’opposaient symboles d’un pays fracturé.
Le drapeau vert-blanc-noir avec trois étoiles rouges est aujourd’hui celui des nouveau maitres de Damas. Hérité de l’indépendance (1932), il a été ressorti en 2011 par l’opposition à Bachard Al Assad . Il incarne la lutte pour la liberté, la chute de la dictature, l’espoir d’un avenir démocratique.
Face à lui, le drapeau rouge-blanc-noir avec deux étoiles vertes reste celui du régime de Bachar al-Assad. Inspiré de l’union panarabe des années 50, il est aujourd’hui perçu comme le symbole de la répression et de l'autoritarisme.
Deux drapeaux. Deux visions. Une même terre en quête de paix.
Sans totalement disparaître, à Damas comme dans la majorité de la Syrie, la peur a laissé place aux sourires, aux discussions et à l’espoir de jours meilleurs. Sous l’ancien régime, on murmurait plus qu’on ne parlait. Un proverbe courant résumait l’ambiance : "Les murs ont des oreilles." Dans les cafés, dans la rue, même entre voisins, les discussions restaient superficielles et les visages fermés. Chacun savait que quelques mots de trop pouvaient mener tout droit dans les geôles du pouvoir.
Aujourd’hui, ces murs-là tombent, un à un. À Damas, les symboles du régime d'Al Assad sont retiré, détruit et piétinés sans détour : les portraits de Bachar al-Assad traînent à terre, abandonnés, comme la peur qu’ils représentaient. Les passants ne les contournent plus ils marchent dessus avec assurance.
Dans les souks et sur les places, on vend des drapeaux aux nouvelles couleurs, on accroche des ballons de baudruche où on peu y lire happy.
Ce mot léger dit quelque chose de profond : une population qui se relève, qui respire, qui recommence à se parler.
Ce que le régime avait voulu effacer, la parole, la confiance, la joie revient par vagues timides mais réelles.
Jobar, théâtre de combat entre les révolutionnaires et l'ancienne armée de Bachard . Victime d'attaque chimique en 2013 se quartier est un décor apocalyptique a quelque kilomètre du centre de Damas. malgré ca e revois les gens y revenir comme pour rendre hommage au fantômes de leurs proches qu'ils ont laissé ici.

Sur les murs des milliers d’affiches tapissent les façades, les lampadaires, les entrées d’immeubles. Des visages imprimés, des prénoms, des dates de disparition, un numéro griffonné. C’est la mémoire parallèle du pays. Une mémoire que le régime déchu avait tenté d’effacer.
Des passants s’arrêtent. Ils cherchent du regard un frère, un ami, une fille, un père. Certains fixent les visages en silence en murmurant quelques prières, d’autres échangent des noms, des souvenirs, des fragments d’histoires. Des larmes parfois, de la colère souvent, et une question revient
« Est-ce que tu l’as vu ? » Mais tout le monde sait, que se qui n'ont pas été retrouvé dans les prisons, ne seront probablement jamais retrouvés.
Saidnaya, une des nombreuse prisons de l'horreur cinq jours après l'ouverture de ses portes.

Certains cherchent un nom dans les archives poussiéreuses jeté a même le sol pour étre détruite dans un premier temps et fouillé ensuite. D’autres s’effondrent devant une cellule vide, rongée par le temps et la crasse où survivaient des milliers de détenus. Aujourd'hui il ne reste presque rien. Quelques papiers, des vêtements abandonnés, des graffitis gravés à la main dans le béton. Mais pour ceux qui ont perdu un proche, ce rien est tout. C’est un indice, un lien, un fragment d'une vérité trop longtemps ignoré.
" tout le monde connaît une personne de proche ou de loin qui à subi cet enfer, moi sa été mon frère, alors je veut comprendre dans quelles conditions il a été assassiné. Alors on vient voir, comprendre, tenter de retrouver une trace. "
Hazar, elle, qui passait chaque jours devant cette prison pour se rendre au travail a voulu voir pour comprendre, sont regard pausé sur cette presse où des hommes explique qu’on y a écrasé les prisonniers afin gagner de la place et les faire disparaître. Les bacs d’acide, ou le crématorium pour faire disparaître les cadavres, à l'ouverture certains mûrs on été ouvert pour y sortir des hommes emmurés vivant. Abu Rami lui, pleurait en silence devant tant de cruauté. Pour les personnes rescapé de de l'enfer, il faut reprendre sa vie, se reconstruire intérieurement dans un pays détruit .

Aujourd'hui c'est Soeur Houda à qui incombe d'être la gardienne de Mar Moussa, se monastère perché en haut de la montagne construit au Xe et peint XI eme siècle de Saint-Moïse-l’Abyssin, célèbre pour le combat du dialogue inter-religieux qu'il prône. Tel fut père Paolo, soutien de la révolution, enlevé en 2013 qui n’est jamais réapparu.
" Maintenant ils nous faut espérer, que nous travailleront ensemble pour reconstruire se beau pays.. "
Soeur Houda
La route qui file vers le nord de la Syrie, chaque kilomètre porte les stigmates de quinze années de guerre. Même le vent semble chargé de cendres. Dans les villes du centre, l’armée régulière, longtemps pilier du pouvoir, n’était plus que l’ombre d’elle-même. Des unités sous-payées, fatiguées, parfois affamées qui avaient déjà déserté silencieuses. Des postes qui tenaient par habitude, plus que par obligation que par conviction. Dans certains villages, les soldats n’ont pas combattu : ils sont partis avant même l’arrivée de HTS, laissant derrière eux des barrages vides et des tentes abandonnées. Selon plusieurs sources locales, l’opération de HTS a été planifiée pendant des mois, à l’abri des regards. Le groupe a profité de l'absence du dictateur absent du pays, d’un régime affaibli et moins aidé par ses allées russe avec la guerre en Ukraine et une population qui ne croyait plus en aucune promesse officielle.

Partout, les habitants voient passer de nouveaux drapeaux sans réellement savoir ce que cela changera. Beaucoup se disent malgré tout soulagés de la chute de l’ennemi, assez, du moins, pour sortir chaque jour célébrer le renversement du régime.
Pour d’autres, l’inquiétude domine. La peur aussi, surtout parmi les minorités religieuses qui redoutent les représailles. Dans plusieurs localités, des opérations de « sécurisation » menées par HTS ont donné lieu à des arrestations massives et à des exécutions dans la communauté alaouite.

Interview
Archevêque de Homs
« Au début, je crois que tous les Syriens ont célébré ce changement. Pour beaucoup, c’était inattendu, et grâce à Dieu il n’y a pas eu beaucoup de morts. C’était une manière de changer le système d’un pays qui a toujours vécu sous un pouvoir dictatorial. Je pense que c’était une bonne occasion, un bon modèle même, qui pourrait inspirer d’autres peuples vivant sous des régimes autoritaires.
Ensuite, des représentants sont venus nous rencontrer. La première entrevue s’est très bien passée : leurs discours étaient gentils, positifs, pleins de projections d’avenir. Ils parlaient d’égalité, de citoyenneté. Ils disaient que les minorités faisaient partie de l’origine même de la population syrienne. Notre sentiment, au début, était donc très bon.
Mais concrètement, nous avons reçu des témoignages venant de Homs qui dénoncent des actes de violence, des paroles fanatiques, des comportements hostiles… notamment envers les chrétiens. Dans certains cas, il s’agissait peut-être d’actes individuels. Pour ce qui est de l’alcool, par exemple, ce n’est pas si différent de ce que nous avons connu dans d’autres périodes. Peut-être devons-nous rester confiants.
En revanche, lorsque nous avons vu le Premier ministre défiler avec le drapeau syrien accompagné du drapeau islamique, cela a été un choc pour nous, les minorités. Ils ont entendu nos critiques et diffusé ensuite une nouvelle photo sans le drapeau islamique, mais le malaise reste.
À un autre niveau, il y a les massacres commis dans plusieurs régions et aux frontières. Ce n’est pas un bon signe. Ces derniers jours, plusieurs jeunes alaouites ont été tués. Ce que je peux dire, c’est que beaucoup d’Alaouites détestaient Bachar et l’ont payé très cher. On ne peut pas affirmer que tous les Alaouites soutenaient le régime. Donc je ne pense pas que tous ces actes de vengeance soient justifiables. Si nous restons dans la logique de la violence, rien ne changera.
Aujourd’hui, si nous voulons construire un pays fondé sur la paix et la justice, il faut absolument écarter tout désir de vengeance humaine. Avec les autres chefs religieux, nous avons rencontré un représentant il y a quatre jours, mais mon sentiment n’est pas positif.
Tous les responsables religieux ont démissionné après la chute de Bachar. Peut-être reprendront-ils leurs fonctions si le nouveau gouvernement leur en donne l’accord. Nous ne savons pas encore. Nous attendons…
Dans le discours de certains dirigeants, on sent une volonté d’aller vers un pays démocratique. Mais pas chez tous, et c’est là que réside le problème. Prenez l’exemple du palais de justice : c’est une catastrophe. La personne qui en a pris la direction impose la charia depuis son arrivée. Il se permet d’humilier les hommes et les femmes, il est extrêmement radical. La justice — qui aurait pu être le dernier espoir de liberté dans ce pays se transforme en loi islamique stricte. Cela ne peut pas fonctionner.
Lorsque nous avons rencontré le gouverneur de Homs, j’ai exprimé mes inquiétudes, celles des chrétiens, mais aussi celles de tous les Syriens, je pense. Il m’a répondu qu’il ne pouvait rien faire, que les décisions se prenaient au niveau du gouvernement. J’espère sincèrement que les choses évolueront dans le bon sens. »



































































































